Une classe à problèmes, disait-on. Quelques petits caïds semblaient avoir une main-mise sur le reste de leurs camarades. Un vrai baril de poudre, cette classe. Une allumette a suffi à tout faire exploser. Un professeur. Plus coriace que les autres, semblait-t-il. Il s'opposa à eux. La sentence tomba : ils le pousseraient au suicide. La menace avait été claire, formulée. Le mal fut peut-être de ne pas les prendre au sérieux. La fin de l'année scolaire arriva. Chacun repartit de son côté. Certains avec plus d'amertume que d'autres. On dit que la vengeance est un plat qui se mange froid. Ils appliquèrent à la lettre cette formule...
Peu de temps après, alors que cette histoire semblait être oubliée de tous, des filles de l'ancienne classe se présentèrent à l'administration de leur lycée. Leur plainte était claire : un professeur leur avait fait des propositions déplacées. Ce même professeur... Porter plainte pour harcèlement sexuel ? Hors de question, le faux témoignage était préhensible de fortes peines.
C'était il y a environ cinq ans de cela, à une époque où l'administration était tatillonne sur cet épineux sujet. Sans autre forme de procès, le professeur fut remercié, et fut invité à prendre ses affaires et à quitter son poste. Définitivement.
Il ne porta pas plainte, s'attendant à ce que l'administration le soutienne. Rien à faire. Alors l'ancien professeur entama une grève de la faim. Toujours rien...
Quelques temps après son éviction pourtant, des élèves de l'ancienne poudrière étaient allés voir ses collègues, et avaient avoué que cette histoire avait été inventée de toutes pièces, que le harcèlement n'avait jamais eu lieu, que c'était pure méchanceté, qu'ils le regrettaient, et tout le reste. Mais la machine était lancée, et la marche-arrière n'était plus possible.
La semaine dernière, nous avons appris son suicide. Une flamme qui s'éteint... Finalement, ses anciens élèves avaient atteint leur objectif. Mais d'eux, l'histoire ne parle pas. Quelque part en France, ces nouveaux adultes "responsables", citoyens, coulent des jours heureux alors qu'ils ont, dans leur adolescence, ruiné la vie d'un homme, d'une famille, de ses proches. Sont-ils contents ? Ont-ils atteint leur objectif ? Qu'est-ce que cela fait d'avoir du sang sur les mains ? Non, ils n'auront pas à répondre à ces questions, car ils ne seront jamais inquiétés.
De leur côté, les anciens collègues du professeur réunissent un dossier afin de se constituer partie civile, afin de réouvrir l'affaire. Pour laver son honneur...
Toi, petite fille de quatre ans que ton père a laissée... Il est encore trop tôt pour que tu comprennes. Mais n'écoute pas ce que les ragots disent de ton père. Sache juste que... C'était une classe à problèmes, disait-on...
Ecrit par Grezel, le Samedi 14 Décembre 2002, 17:46 dans la rubrique "Divers". Repondre a cet article
Commentaires:
une remarque générale
Ecrit par tgtg le Samedi 14 Décembre 2002, 19:34
Certains jeunes ne se rendent pas compte à quel point ils peuvent "faire mal" à un prof.
Hé bien
Ecrit par Grezel le Dimanche 15 Décembre 2002, 20:56
J'ai fait ma recherche sur Google, et cette citation semblerait être attribuée à Paul Verlaine :
"Il pleure dans mon coeur
Comme il pleut sur la ville ;
Quelle est cette langueur
Qui pénètre mon coeur ?" Romances sans paroles